Crédit : ESA/ NASA

« The Bigger Picture », cette série de photographies, exposées à l’occasion du Luxembourg Sustainability Forum 2017, présente notre planète depuis l’espace. Prises par le spationaute français Thomas Pesquet au cours de son voyage à bord de l’ISS, ces images nous proposent une perspective nouvelle et inspirante de la Terre, une approche qui nous abstrait de notre quotidien. Cette sélection de clichés se découvre à travers six catégories mettant en lumière les enjeux critiques présents et à venir auxquels nous sommes confrontés. Elle s’affirme comme une véritable tribune pour le développement durable. Fervent défenseur de ces questions, Thomas Pesquet a ainsi symboliquement emporté avec lui une copie de l’Accord de Paris dans l’espace. Nous vous invitons, en apesanteur quelques instants, à saisir cette vue d’ensemble : « The Bigger Picture ».



CLIMATS CHANGEANTS : DANGERS À LA HAUSSE

« Loin d’être uniformes et ennuyeux, les déserts m’ont frappé par leur diversité et leur étendue. Les écosystèmes arides sont malheureusement particulièrement fragiles devant les déséquilibres engendrés par certaines activités humaines. Un exemple parmi tant d’autres : la grande oasis d’Azraq devrait figurer sur ce cliché pris en survolant la Jordanie, si les eaux souterraines de ses aquifères ne subissaient pas le surpompage… Un péril qui affecte gravement la faune, la flore et de nombreuses populations souvent déjà vulnérables ! » - Thomas Pesquet

Notre climat change. La science le prouve de façon irréfutable. Ces changements sont reconnus comme étant presque exclusivement causés par l’Homme. La quasi-totalité des climatologues affirment en effet avec certitude que les modèles actuels et futurs du changement climatique sont d’origine anthropique. Provoqués par les différentes entreprises humaines qui modifient radicalement les systèmes de la Terre, la manifestation la plus frappante de ces changements climatiques est l’augmentation globale des températures moyennes. Les services météorologiques enregistrent chaque mois des températures record, le mois de juillet 2016 étant le mois le plus chaud jamais enregistré, à 0.87° au-dessus de la moyenne du 20e siècle. Quelques-uns des principaux changements liés à la hausse des températures mondiales sont ici présentés. Certains sont déjà observés, d’autres sont amenés à s’aggraver à l’heure où les boucles de rétroaction s’auto-alimentent et intensifient leurs effets. De plus, les prévisions estiment que le réchauffement climatique aura un impact plus important sur des populations déjà défavorisées et vulnérables.

Crédit : ESA / NASA

« Avec le réchauffement climatique, les régions désertiques de la planète sont appelées à s'étendre. Cela se produira dans les zones de transition instables entre les déserts et les plaines qui s'ensuivent. Avec le réchauffement climatique, ces régions perdront le peu d'eau dont elles disposent et deviendront naturellement plus arides. Cette situation sera encore aggravée par le transport du sable par le vent. » - Thomas Pesquet

CHIFFRES CLÉS
+4°C

Augmentation de température prévue d'ici à 2100 dans l’hypothèse d’un modèle inchangé de notre mode de vie

2°C

Augmentation moyenne maximale des températures convenue dans l’Accord de Paris

150-250 km3

des glaces fondent chaque année au Groenland (2002 à 2006)

L'EAU : LA PLANÈTE BLEUE

La Terre, notre unique demeure, la bien nommée « planète bleue ». L’eau y est une nécessité absolue. Sa simple présence est primordiale mais aussi son rôle critique dans le bon fonctionnement des processus, touchant aussi bien la biologie moléculaire, la géographie, la physique ou encore l’industrie. Elle est une composante essentielle à la vie humaine elle-même : nous devons environ 70% de notre composition corporelle à l’eau. Son importance et son omniprésence sont incontestables, et grâce aux nombreuses possibilités qu’elle nous offre, son utilisation est également multiforme.

Aujourd’hui cependant, notre relation à l’eau subit de grands changements et souvent pour le pire.


Crédit : ESA / NASA

« Incroyables effets de couleurs sur l’eau du delta du Saloum au Sénégal. Dire qu’avec l’élévation du niveau de la mer, ses îles et leurs habitants subissent déjà les dégâts du réchauffement climatique... Il est urgent d’agir! » - Thomas Pesquet

CHIFFRES CLÉS
71%

de la surface de la Terre est constituée d’eau, dont 96,5% dans les océans

30%

de la population mondiale sera victime de la pénurie d’eau d’ici 2025

2050

l’année où la masse de plastique dans les océans surpassera la masse des poissons - 20 000 bouteilles en plastique sont achetées dans le monde chaque seconde

ALIMENTATION : UN APPÉTIT DÉBORDANT

De nos jours, la nourriture est abondante, mais bien qu’elle soit globalement suffisante pour alimenter aisément la population mondiale, son accès et sa distribution s’avèrent très inégaux sur les territoires. L’ONU estime qu’environ 793 millions de personnes restent sous-alimentées.

Produire de si grandes quantités de nourriture n’est possible qu’en raison de la deuxième révolution agricole qui s’est déroulée au cours de la seconde moitié du 20e siècle. Ces processus radicaux de mécanisation et de stimulation chimique permettent de produire toujours plus d’aliments plus rapidement. Associée à l’essor de l’agro-industrie stimulée notamment par une demande croissante pour les produits carnés, la production alimentaire s’est largement accrue et empiète sur de nombreuses zones de la surface terrestre. L’échelle gigantesque des pratiques agricoles contemporaines est reconnue comme étant non viable, tant en termes de production de nourriture que de consommation. Nous sommes aujourd’hui confrontés à la réalité d’une surproduction engendrant un gaspillage inutile. Selon l’estimation de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture), 1/3 des aliments produits au cours d’une année ne sont pas consommés. Un constat qui souligne un besoin urgent de reconceptualiser la façon dont nous concevons l’alimentation.


Crédit : ESA / NASA

« Contraste surprenant en Arizona : champs irrigués en plein désert… L’impact extrême des activités humaines sur la nature en un seul cliché. » - Thomas Pesquet

CHIFFRES CLÉS
~70%

de l’eau douce est destinée à l’agriculture

48

terrains de football. Surface déforestée chaque minute

3000 litres

(ou l’équivalent de 2 mois de douche) est la quantité d’eau nécessaire pour produire un hamburger

CICATRICES HUMAINES : UN IMPACT DURABLE

Certaines activités anthropiques illustrent plus clairement l’effet dévastateur que nous, humains, exerçons collectivement sur notre planète. Ces activités incluent notamment les processus d’extraction intensive et les projets d’infrastructure de grande envergure. Ces entreprises humaines modifient radicalement le paysage physique : bien qu’elles semblent offrir certains avantages pour la société, elles marquent à jamais les environnements locaux, les rendant inaccessibles ou diminuant leurs capacités écologiques.


Crédit : ESA / NASA

« Au Botswana, dans un impressionnant désert de sel, les teintes de rouge d’une mine d’extraction de sodium… »- Thomas Pesquet

CHIFFRES CLÉS
43,5

millions de tonnes - production mondiale d’aluminium par an

0

El Salvador est le premier pays à interdire l’exploitation minière des métaux

41,8

millions de tonnes de déchets électroniques et électriques, produits dans le monde en 2014

VILLES : DOMINATION URBAINE

La domination des villes s’impose comme un changement majeur du monde contemporain. Ces centres de culture et d’information sont la scène sur laquelle se jouent l’économie mondiale et les interactions internationales. De tout temps, l’attractivité des villes a déplacé les populations en quête d’opportunités socio-économiques. L’ampleur de ce phénomène mondial cependant est inédite. Un récent rapport de l’ONU indique que 66% d’entre nous vivront dans des villes en 2050, un chiffre plus que doublé en un siècle. À quoi ressemblera ce monde urbain ? Les villes devront s’adapter pour accueillir ces grands afflux massifs ruraux et internationaux ; elles feront face à de nouveaux enjeux considérables, notamment en ce qui concerne l’infrastructure, la cohésion sociale et le réchauffement planétaire. En bref, alors que nous entrons dans une ère de domination urbaine, les villes devront devenir « intelligentes » afin d’opérer correctement cette transformation, sans toutefois se déshumaniser.

Crédit : ESA / NASA

« La ville rentre à peine dans mon cadre… » - Thomas Pesquet

CHIFFRES CLÉS
2008

l’année où la population urbaine a dépassé la population rurale dans le monde

2%

la proportion du territoire chinois où vivent plus que la moitié (54%) de la population du pays

41

mégapoles (10 millions d’habitants ou plus) devraient voir le jour d’ici 2030. En 2014, il en existait 28

MERVEILLES NATURELLES : UNE BEAUTÉ FRAGILE

Plutôt que de souligner les changements que les humains exercent sur la planète - une perspective décidément anthropocentrique – il convient désormais particulièrement de s’attarder sur les merveilles du monde naturel qui peinent à perdurer face à un climat changeant. Notre planète est résiliente et les systèmes terrestres se rééquilibrent en permanence face aux transformations rencontrées. Cependant, cet exercice continuel de stabilisation mène à de nouveaux équilibres et entraîne la perte de trésors naturels. Il convient de les nommer « merveilles » précisément parce que nous sommes en mesure d’apprécier toute leur beauté et leur valeur dans le monde naturel qui nous entoure. C’est précisément cette capacité d’émerveillement qui nous confère une responsabilité de gérance environnementale : protéger plutôt qu’endommager, et se reconnecter au monde naturel. En effet, cette dichotomie même entre « naturel » et « humain » est un concept binaire qu’il importe de questionner. Malgré les différences substantielles qui nous distinguent de la « nature », nous, êtres humains, venons aussi de ce monde naturel. Une évidence que chacun devrait garder à l’esprit.


Crédit : ESA / NASA

« En aval de Kiev, l’hiver a figé le fleuve Dniepr en pleine bataille artistique. » - Thomas Pesquet

Crédit : ESA / NASA